Le Montant du Dépôt de Garantie : une Liberté sous Conditions

Le Régime Actuel (2025) : Une Liberté Contractuelle Régulée

En l'état actuel du droit, le montant du dépôt de garantie en bail commercial est librement fixé par les parties. Aucun plafond légal n'existe.

Cependant, cette liberté est tempérée par une règle fiscale et financière importante posée par l'article L. 145-40 du Code de commerce : si les sommes versées d'avance (loyers payés d'avance + dépôt de garantie) excèdent deux termes de loyer, la somme excédentaire doit produire des intérêts au profit du locataire, au taux pratiqué par la Banque de France pour les avances sur titres. Cette disposition a pour effet de limiter en pratique le montant demandé par les bailleurs.

La Réforme à Venir : Vers un Plafonnement Strict

Un projet de loi de simplification de la vie économique (déposé au Sénat le 24 avril 2024) prévoit de modifier en profondeur ce régime. L'article 24 du projet vise à compléter l'article L. 145-40 du Code de commerce en instaurant un plafond légal :

• Le dépôt de garantie ne pourra plus excéder trois mois de loyer.
• Cette mesure, si elle est adoptée, s'appliquera aux baux conclus ou renouvelés après la promulgation de la loi et mettra fin à la liberté contractuelle sur ce point.

La Restitution du Dépôt de Garantie : le Droit et la Pratique

Conditions et Délai Actuels : un Flou Juridique Source de Conflits

Actuellement, aucun texte ne fixe de délai légal pour la restitution du dépôt de garantie en matière commerciale.

• Condition préalable : La restitution n'est due qu'après la libération effective des lieux, qui se matérialise par la remise des clés au bailleur ou à son mandataire. Tant que cette remise n'a pas eu lieu, le bailleur est en droit de conserver le dépôt.
• Délai : En l'absence de clause dans le bail, la jurisprudence impose un "délai raisonnable" pour permettre au bailleur d'arrêter les comptes (charges, éventuels travaux...). Une rétention jugée abusive et injustifiée au-delà de ce délai constitue un manquement contractuel engageant la responsabilité du bailleur, qui peut être condamné à verser le montant du dépôt, des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, et des dommages-intérêts (CA Paris, 29 janv. 1991, n° 89-18513).

La Réforme à Venir : l'Instauration d'un Délai Légal de 3 Mois

Le même projet de loi prévoit de mettre fin à cette incertitude en instaurant un délai maximal de restitution de trois mois à compter de la remise des clés. La restitution se fera "déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées". Cette mesure s'appliquerait y compris aux baux en cours au moment de la promulgation de la loi.

La Rétention du Dépôt : les Justifications Exigées du Bailleur

Le bailleur ne peut conserver le dépôt de garantie de manière discrétionnaire. Il doit justifier sa rétention. Pour imputer le coût de réparations locatives sur le dépôt, la Cour de cassation exige que le bailleur rapporte la preuve cumulative de trois éléments :

1. Une faute du locataire (un manquement à ses obligations d'entretien).
2. Un préjudice réel subi par le bailleur.
3. Un lien de causalité entre la faute et le préjudice.

Cette jurisprudence, issue d'un revirement important (Cass. 3e civ., 3 déc. 2003, n° 02-18.033), a renforcé la protection du locataire contre les rétentions abusives. Les clauses du bail peuvent toutefois prévoir une indemnisation forfaitaire, mais leur validité est appréciée au cas par cas.

Tableau Récapitulatif : Régime Actuel vs. Réforme à Venir